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31 mai 2016 2 31 /05 /mai /2016 15:52

La vraie question concernant l’initiative d’Emmanuel Macron n’est pas de savoir s’il roule pour François Hollande, pour lui-même ou encore s’il concurrence Manuel Valls sur son propre terrain. Ajouter de la confusion à la confusion ne présente guère d’intérêt au moment de la discussion au Parlement de la loi Travail. Le vrai sujet est au contraire de comprendre que le Président, le Premier ministre et le ministre de l’Économie poursuivent d’un commun accord la marche vers la transformation de notre modèle social, une marche arrière malheureusement plutôt qu’une marche avant, quoiqu’en dise François Hollande qui prétend préserver notre modèle social français.

La refondation dont le pays a besoin selon Emmanuel Macron « doit se faire sur des valeurs communes: la liberté et la justice, le travail, le progrès, l’Europe ». Et depuis Londres, il incite François Hollande à prendre « des décisions ambitieuses » et à faire « des réformes radicales, fortes et ambitieuses » pour être « dans une situation de gagner » en 2017. Sous-entendu faire les réformes qui dérégulent et favorisent le dumping social, qui accroissent la flexibilité au détriment de la sécurité. Emmanuel Macron veut aller jusqu’au bout de la logique de la transformation néolibérale du modèle économique et social français engagée depuis les premières réformes de la législation du travail à partir de 1977. Pour lui comme pour le MEDEF la loi travail ne va pas assez loin.

Et pourtant le texte même modifié dans le sens que ne souhaite pas le ministre de l’Économie, en dépit des mesures positives qu’il contient désormais en particulier en faveur des jeunes, s’avère être également une nouvelle opération de dérégulation du travail :

  • conditions moins favorables pour négocier la majoration des heures supplémentaires dans le cadre de l’entreprise par rapport à celles de la convention de branche,
  • conditions facilitant l’organisation du référendum d’entreprise.

En effet, depuis près de quarante ans les réformes successives de la législation du travail ont facilité le développement des contrats précaires et de la flexibilité interne des entreprises. Elles n’ont pas pour autant permis de créer les emplois pour faire reculer le chômage de masse apparu dans le même temps. Mais elles ont provoqué l’accroissement des inégalités sociales. C’est ce que comprennent désormais une majorité de nos concitoyens qui s’opposent à cette énième réforme du même type tout comme une partie de notre jeunesse qui manifeste contre le projet de loi travail.

L’ubérisation de l’économie que veut accélérer Emmanuel Macron peut faire malgré tout illusion en faisant croire à la création d’emploi possible et facile de l’entreprise individuelle qui crée son emploi. À la fin des  années 70, Raymond Barre proposait déjà aux chômeurs de créer leur entreprise et leur emploi. La popularité provisoire d’Emmanuel Macron procède finalement d’une illusion déjà ancienne.

Mais face à un chômage qui ne s’inverse toujours pas et à la précarisation toujours plus grande de l’emploi qui dévalorise le travail, face à l’aggravation des inégalités sociales qui fracturent la cohésion sociale et nationale, la question centrale pour les socialistes et la gauche doit être à la fois de concevoir les conditions d’une nouvelle croissance durable favorisant la création d’emplois durables et de repenser les conditions de travail permettant de donner à nouveau du sens au travail. Si en 2016 la gauche ne me satisfait pas, ce n’est pas pour les mêmes raisons qu’Emmanuel Macron. Lui propose le vieux projet consistant à confondre droite et gauche pour mieux répondre aux besoins de la mondialisation et de l’Europe. Moi c’est parce que le quatre-vingtième anniversaire du Front Populaire de 1936 mérite mieux qu’une gauche qui tourne le dos à son histoire et à son idéal et qui est surtout impuissante à agir sur le réel. Je n’ai pas brigué vos suffrages en 2012 pour faire cela.

Jean-Pierre Blazy
député socialiste, maire de Gonesse

1936-2016: EN MARCHE… AVANT OU ARRIÈRE ?
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commentaires

Ç
M. le ministre de l'économie devrait opter pour le tee shirt,définitivement.Il faut se mettre à l'aise,se rapprocher des habitants de ce pays,faire preuve de davantage d'empathie.La France est une République,composée de citoyens et non pas de sujets.M. le ministre de l'économie ne comprend pas cela à l'évidence:l'Ancien régime c'est fini,c'était avant!Nous n'avons pas besoin de "has been" pour diriger la France!
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