Cette contribution thématique est déposée par Maintenant la Gauche et reprend les analyses et propositions que nous n'avons pas pu publier dans la contribution générale «Le sursaut républicain, un coup de jeune pour le socialisme». Vous pouvez retrouver l'ensemble de notre texte et de nos signataires sur www.maintenantlagauche.fr
* * *
Pas de sursaut républicain sans la mise en mouvement des partis politiques. À rebours d’une opinion parfois émise, nous pensons que les partis ont un rôle essentiel à jouer, même s’ils doivent se transformer.
Adhérents, militants, nous avons tous pris notre carte dans un parti politique pour changer le monde. Nous avons, nous socialistes, choisi un parti qui a une histoire plus que séculaire, qui a traversé deux guerres mondiales et encore plus de crises.
Contrairement à ce qui est parfois complaisamment relayé, nous socialistes n’avons aucun problème à exercer le pouvoir. Nous dirigeons des milliers de collectivités locales. Nous avons dirigé la France à plusieurs reprises sous la Vème République.
Mais il est possible de s'interroger sur les difficultés rencontrées par le Parti Socialiste à exister et à être utile, en tant qu'organisation politique, lorsque les siens sont aux responsabilités.
Qu’est-ce qui fait que, quand les nôtres accèdent au pouvoir d’État, le Parti semble « fermé pour cause de gouvernement » ? Pourquoi l’avis de celles et ceux qui ont permis, par leur infatigable militantisme, la victoire électorale, est-il à ce point ignoré, en dépit des sérieux avertissements que constituent les défaites aux élections intermédiaires ? Comment se fait-il que la seule réponse apportée aux doutes et aux questions des adhérents se résume à une seule injonction : la solidarité avec l’exécutif ! Avons-nous à ce point digéré les institutions gaulliennes que nous en oublions, une fois la victoire acquise, la nécessaire délibération collective ? Socialistes, nous ne saurions avoir le culte du chef. La solidarité doit fonctionner dans les deux sens. Solidaires de nos camarades de l’exécutif, oui, mais à condition qu’eux-mêmes soient solidaires des militants et, à travers eux, des électrices et des électeurs qui les ont porté au pouvoir, en respectant nos engagements communs.
Nous ne sommes pas un parti qui aime à personnifier le pouvoir. Nous sommes un parti à la démocratie proportionnelle.Le débat et la représentativité sont des bienfaits et correspondent à notre manière de voir le monde.
Dans ces conditions, si le PS veut éviter sa propre mort, il doit impérativement travailler à résoudre et dépasser la crise idéologique qui a atteint le socialisme démocratique sous les effets conjugués de la révolution néo-libérale des années 1970 et de l'effondrement du bloc soviétique.
Il nous faut réapprendre collectivement à voir le monde et à l’entendre.
Le rôle d'un militant et d'un parti socialistes, c'est de travailler à rassembler les citoyens pour chercher ensemble les moyens de concrétiser des objectifs qui nous dépassent. Léon Blum a fixé le 27 décembre 1920 lors du congrès de Tours une tâche essentielle et toujours actuelle d'un parti et d'un militant socialiste :
« Si vous estimez que le but c’est la transformation, que c’est la transformation qui est la révolution, alors tout ce qui, même dans le cadre de la société bourgeoise, peut préparer cette transformation, devient travail révolutionnaire. Si là est la révolution, alors l’effort quotidien de propagande qu’accomplit le militant, c’est la révolution avançant un peu chaque jour. Tout ce qui est organisation et propagande socialiste, tout ce qui est extension à l’intérieur de la société capitaliste de ces organisations ouvrières de toutes sortes, […] tout cela est révolutionnaire. »
Le rôle des socialistes est donc bien de se doter avec sérieux et ténacité d'un projet de société et de tenter de mobiliser pour permettre sa mise en œuvre, ce qui permettra en parallèle de multiplier les allers-retours avec le peuple, de renforcer la démocratie participative, car, en aucun cas, le parti ne doit être une espèce d'avant-garde éclairée, coupée de la société.
Ce n'est pas parce qu'il y aurait une mauvaise structuration du Parti que la société civile, les associations, les syndicats rechignent aujourd'hui à rencontrer les représentants du PS ; ce n'est pas parce que les modalités d'adhésion au PS seraient complexes (ce n’est pas le cas) que le parti connaît aujourd'hui une perte importante de ses adhérents ; ce n'est pas parce que nous serions mal organisés sur Twitter, que nous manquerions de pédagogie ou que nos infographies (ou celles du gouvernement) ne seraient pas assez percutantes que l'exécutif et le PS sont désavoués par l'opinion publique : c'est l'effet de la politique économique gouvernementale, qui est en contradiction avec nos engagements de campagne et nos valeurs et qui les éloigne de nous.
Pour retenir électeurs et militants socialistes, il n'y a pas besoin d'un « choc de simplification » bureaucratique et partisan : il faut simplement répondre à leurs attentes, respecter la cohérence entre nos engagements et nos actes au pouvoir.
Sans cela, nous pourrons faire toutes les campagnes électorales que nous voudrons, nous ne regagnerons pas la confiance des catégories populaires. Si nous continuons d'utiliser les mots et les concepts des néo-libéraux, nous serons victimes de la triangulation que nous avons voulu mettre en œuvre ; les droites radicales et le Front National continueront de prospérer chez les ouvriers et les employés (aux côtés de l'abstention), sur fond de mise en compétition des « opprimés », des « déclassés » contre les « assistés », avec un renforcement de l'ethnicisation de certains rapports sociaux et politiques, propices à la « lepénisation des esprits ».
Donc, si la première tâche d'un parti socialiste démocratique est d'élaborer un projet de société, une orientation politique, en associant les militants à cette élaboration, alors il est indispensable de donner aux militants socialistes les outils intellectuels, critiques, les connaissances, nécessaires à leur intervention dans l'élaboration de l'orientation politique. C'est pourquoi le rôle de la formation, et notamment la formation idéologique, dans le parti est vital. À l’occasion de ce congrès, sachons en faire une priorité opérationnelle.
La victoire de Syriza en Grèce est bienvenue. C'est une bonne nouvelle pour les Grecs et pour l'Europe, c'est un espoir pour tous ceux qui défendent une alternative aux politiques d'austérité.
Elle s'inscrit dans une crise économique et sociale profonde, aggravée par une série de cures d'austérité ineptes, imposées de l'extérieur par la Troïka et appliquées puis soutenues par le PASOK, représentant local et traditionnel du socialisme européen.
C'est un avertissement sérieux pour tous les partis du PSE.
Les élections se succèdent en Europe et confirment la perte d'influence de notre famille politique. Lorsqu'ils gagnent, les partis socialistes le font poussivement, mais leurs défaites sont souvent lourdes. Dans de nombreux États, ils sont déjà réduits à des rôles de supplétifs dans des gouvernements de droite.
La famille social-démocrate n'a pas retenu la leçon des années 1990-2000 durant lesquelles ses membres ont mené des politiques libérales, funestes économiquement, socialement et électoralement.
Si les socialistes européens veulent sortir de l'impasse politique, il est urgent d'engager un dialogue structurel avec les nouvelles forces de gauche ou celles qui ont su se renouveler alors que nous n'arrivions pas à le faire.
Nous devons mettre fin au « compromis historique » avec les anciens démocrates-chrétiens, devenus conservateurs. Nous devons nous rapprocher du Parti de la Gauche européenne, et des Écologistes. Seule cette option nous permet de rendre crédible la perspective d'une alternative politique européenne.
Nous devons révolutionner le PSE qui n'est pas à la hauteur des enjeux ; le PS français doit assumer de porter les débats que les sociaux-démocrates n'osent pas affronter. Les militants doivent être convoqués pour se prononcer sur l'orientation politique du PSE et ses dirigeants.
Enfin, les socialistes français doivent interroger le périmètre politique de l'Internationale Socialiste, qui n'a plus aucune cohérence interne et n'est plus en mesure de peser sur les débats internationaux. La dernière action réelle de l'IS a été l'accouchement des accords d'Oslo en 1993, en mettant autour de la table le Fatah et les travaillistes israéliens. Depuis plus rien !
1) Un parti mobilisé et au cœur de la gauche
1- Le parti doit peser sur la politique gouvernementale. Il doit aussi mobiliser pour construire le rapport de force. Nous proposons plusieurs grandes campagnes : des nouveaux droits pour les travailleurs, le droit de vote des étrangers, le rejet du traité de libre-échange entre l'UE et les USA, l'exigence d'une réorientation européenne (en coordonnant la campagne avec les autres forces anti-austérité en Europe).
2- Sans rassemblement de la gauche, le temps nous est compté face à la droite et à l’extrême droite. Instaurons un comité de liaison régulier de la gauche et des écologistes pour échanger sur les sujets d’actualité, proposer les réformes urgentes capables de consolider la majorité parlementaire pour la fin du quinquennat, mais aussi préparer les prochaines échéances locales, ainsi que des primaires ouvertes à gauche.
3- Notre présence dans le mouvement social, sur le terrain est une nécessité pour trouver les complémentarités indispensables entre l’initiative associative, syndicale, citoyenne et l’action politique. Tous les militants socialistes ont vocation à adhérer à un syndicat.
4- Nous devons reprendre pied dans le monde du travail. Le secrétariat national aux entreprises retrouvera une place majeure, nous encouragerons la constitution de sections « professionnelles ».
5- La fédération des français de l’étranger est une richesse méconnue du Parti qui doit davantage solliciter l’expertise de ses militants. Si ses militants le souhaitent, nous pourrions créer une fédération des français en Union Européenne et une fédération des français hors de l’UE, permettant un travail spécifique du secrétariat national à l’Europe avec l’une et à l’international avec l’autre.
2) Un parti de débat et de conquêtes
6- Des grandes conventions sur des sujets essentiels – le travail et la production, la révolution fiscale, les questions internationales, Éducation/Culture/République, transformation écologique – seront organisées, avec droit d’amendements pour les militants.
7- Le Conseil national est le parlement du PS. Il doit devenir un lieu de débat et d’orientation, être suivi d'effet et donc être clôt par des résolutions opérationnelles. Les CN se tiendront effectivement une journée entière, régulièrement dans nos régions ; les militants pourront y assister.
8- Restaurons le laboratoire des idées, et dotons l’OURS et la Fondation Jean Jaurès des moyens nécessaires à leur rayonnement.
9- Notre implantation locale a été gravement atteinte. Avant la fin de l’année, le PS aura défini avec les fédérations une stratégie de reconquête à moyen et long terme.
10- Face à l'enlisement « austéritaire » de l’Europe, nous demanderons lors de son congrès une profonde réforme du PSE et l'établissement d'une orientation cohérente et nous engagerons dès juin un dialogue avec l'ensemble des forces de gauche en Europe.
3) Un parti fraternel, solidaire, un parti d’éducation populaire
11- La convivialité n’est pas un vain mot ; depuis des mois, elle a été mise à mal par de graves dysfonctionnements. Uni par un même idéal, nous nous assurerons que nos règles et chacun soient respectés. Au-delà, il faut multiplier les occasions de partage, les moments de camaraderie.
12- Une nouvelle orientation politique rendra crédible une grande campagne d’adhésion. Les 800 000 électeurs des Primaires citoyennes qui avaient souhaité rester en contact n'ont jamais été considérés sérieusement. Il faut les reconquérir.
13- Pour militer, toutes les sections n’ont pas les mêmes moyens. Nous ferons vivre la justice territoriale entre nous en mettant en place des règles transparentes de péréquation financière.
14- S’il veut jouer son rôle, le parti doit aussi reprendre son rôle d’éducateur, pour mener la bataille culturelle. Tous nos camarades ont droit à une formation de qualité. Nous mettrons en place « l’École du Militant », prolongement de l’université permanente décentralisée.
4) Un parti rénové
15- Nous serons intransigeants sur la parité et sur le non cumul des mandats, y compris dans le temps. Nous clarifierons avec fermeté les situations de cumul des fonctions et des responsabilités. Une période de repli électoral ne peut justifier une nouvelle concentration des notabilités.
16- Une consultation permanente des militants et des fédérations est nécessaire.L’hebdo des socialistes doit aussi présenter le travail militant. Le Parti utilisera l'ensemble des solutions numériques à sa disposition pour apporter aux fédérations, sections et militants les moyens de militer, réfléchir et communiquer au quotidien.
Parce que le PS est au pouvoir. Ce que les militants décident aura une incidence directe sur l’action gouvernementale.
Parce qu'il se tient à l’occasion d'une année électorale chargée, risquée pour notre formation. Le PS s'était consolidé grâce à un solide réseau d’élus locaux. Celui-ci est aujourd'hui gravement menacé. Le congrès sera l'occasion d’analyser les élections départementales et de préparer les régionales.
Parce que, sans vouloir dramatiser, la perspective de voir arriver le Front National au pouvoir, à la faveur d’une alliance avec la droite radicalisée, n'est plus à exclure. Aux élections européennes, le FN est arrivé largement en tête, et le PS a réalisé le pire score de son histoire.
Parce que, comme rarement dans l'histoire de la Vème République, la gauche aura été aussi désunie : Le Front de Gauche est dans l'opposition, EELV a quitté le gouvernement. Ce congrès doit débattre des voies et moyens de rassembler la gauche à nouveau, faute de quoi nos chances de l'emporter en 2015 et 2017 seront gravement compromises.
Parce que, comme rarement dans son histoire, le PS aura autant tourné le dos à ses principes. La politique économique et sociale qui est menée au nom des militants socialistes s'éloigne toujours plus des engagements du candidat Hollande en 2012. Surtout, elle repose sur des postulats jamais validés par les militants, et bien souvent que nous avons combattus ensemble quand nous étions dans l'opposition.
Parce que quand la gauche manque à sa parole, elle crée le trouble dans son électorat. Elle contribue aussi à accentuer la crise de confiance dans la politique qui caractérise aujourd'hui notre société, mais plus globalement les sociétés européennes. L'indifférenciation progressive entre gauche et droite sur les questions économiques et sociales, l’impression tenace que les gouvernants craignent plus le verdict des agences de notation que la colère des peuples, le sentiment que tous communient dans un « il n y a pas d’alternative » aussi déprimant et faux que néfaste d'un point de vue démocratique, tout cela suscite de la colère, du découragement de la défiance.
* * *
Le temps du sursaut est venu. Pour la République, pour la France, pour la gauche, sachons en être les promoteurs et les acteurs.
Premier signataire :
Emmanuel MAUREL, député européen, Bureau National
et
FÉRON Hervé député maire de Tomblaine 54 - FERREIRA Anne BN VPCR 2 - FILOCHE Gérard BN 75 - GUEDJ Jérôme PCG BN 91 - HOANG NGOC Liem BN 51 - LIENEMANN Marie-Noëlle BN ancien ministre sénatrice 75 - MATHIEU Sylvain 1er fed 58 - MUNOZ Jonathan 1er fédéral BN 16 - QUILÈS Paul BN ancien ministre maire de Cordes-s/Ciel 81 - SEBAOUN Gérard député 95 - THOMAS Jean-François 1er fédéral BN CR 55 - TALLARD Suzanne députée 17 AIT-KEDDACHE Audrey CNC BF 75 - ARNAUD-LANDAU Arlette CN VPCR 43 - AZAM Rolande maire de Tanus 81 - BERTHIOT Gérard CN VPCR 51 - BIZEUL Alexandre BNA 75 - BOUTIFLAT Dylan CNCF SF 75 - BRANCHEREAU Jean-Claude CNC 76 - CASSANY François CN 3 - CAUET Jérôme VPCG AM 91 - CAYLA David CN 49 - CESA Johann CN SF CM 42 - CHANTECAILLE Martine CN BF CN 85 - CHASSATE Véronique CN BF 54 - COLOMBANI Marc CNC 9 - DAEL Laure CN CF 27 - DAILLY Christian CNCF 75 - DUPOND Cédric CN BF SDS AM 62 - ELBAZE Gérald CN BF 33 - FARAVEL Frédéric BNA BF 95 - FASSO Sybille CN AM 75 - FLEURAT Dominique CN 36 - GATEL Jean ancien ministre 84 - GAY Géraldine CN 11 - GÉRARD Anne CN SF VP Grand Poitiers 86 - GIACALONE Brice CN SF 14 - GOYHENEIX Joël président com. de communes 40 - GRESSUS Michèle maire de Bouguenais et VP Nantes Métrople 44 - GRIGNON-PONCE Véronique Maire de Dompierre 60 - GUERRE Jean-Michel VPCR 03 - HENRY Xavier BNA 75 - JABER Samia VPCG 90 - JEANNE Patrick VPCG 76 - KRIBI-ROMDHANE Hella VPCR BNA BF 91 - LALANNE Jean-Yves maire de Billère VP agglo 64 - LANTERNIER Ugo CN SF 93 - LAPIERRE Patricia CNCF 75 - LASSUS Alain maire de Decize CG 58 - LEFEBVRE Rémi CN SF CN 59 - LEFIBLEC Hervé CNCF BF 60 - LONLAS Maxime CNCF CF 95 - LE PESANT Thierry CN 17 - LOSSON Joëlle CNCF CF 55 - LOUIS Marianne CN CR 91 - LUBRANESKI Yvan maire des Molières 91 - MAKHLOUF Nora CN AM 13 - MARTY Anne-Marie CNCF SF 94 - PASCAL Jean-Michel CN 16 - MARTY Denis Maire de Monesties 81 - MIERMONT Laurent CN AM 75 - MONMÈGE Jean-Michel maire de Cenne Monesties 11 - OGBI Fatima BNA BF AM 91 - PASCAREL Laure CN 75 - PIAZZI Adélaïde CNC SF SDS CM 95 - POUYDESSEAU Mathieu CN SF FFE - RAFAI Mohamed CN SF CR CM 13 - RENAUDIN Christine CN BF CM 21 - REUTER Alain VPCR 2 - RIZZOLI Fabrice CN CM 95 - ROCHE Micheline CNC 12 - ROULLIER Isabelle CNCF BF 91 - SADOUN Marc CNC 75 - SCHWANDER Élodie CN SDS BF 7 - SHAN Judith CN CR 92 - STEINFELD Jean-Alain BNA TF 93 - TABOURET Christine CN BF CM 33 - THOMAS Olivier CN maire de Marcoussis CR BF 91 - THOUZEAU Éric CN CR 44 - TOUCHEFEU Claude CN CM 31 - TOUCHEFEU Catherine VPCG 44 - VAILLEAU Daniel maire d'Angoulin 17 - VASNIER Bertrand CN SF BF 75 - VASSEUR Daniel CN 94 - VUILLEMOT Marc maire de la Seyne-s/Mer CR 83 - WORTHAM Geneviève CN CR 77