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4 mai 2017 4 04 /05 /mai /2017 15:50

Dimanche 23 avril, les Français ont désigné les deux candidats qui s’affronteront lors du deuxième tour de l’élection présidentielle. Quinze ans après l’accession de Jean-Marie Le Pen au second tour le 21 avril 2002, le scénario se répète. Une nouvelle fois, les républicains doivent faire barrage au Front National.

 

Cependant, nous ne pouvons nous résoudre à commettre la même erreur qu’en 2002. Si nous devons voter contre le Front National, il ne s’agit en aucun cas d’un vote d’adhésion pour le candidat d’En Marche ! Je me suis opposé au tournant libéral de François Hollande, j’ai soutenu Arnaud Montebourg lors de la primaire et Benoit Hamon lors du premier tour et j’ai toujours été constant dans mes choix. J’en appelle donc aujourd’hui à une mobilisation pour défaire le Front national.

 

Les inquiétudes soulevées par la présence de Marine Le Pen au second tour ne doivent cependant pas nous faire oublier que ce sont justement les politiques libérales et austéritaires qui sont à l’origine du basculement du vote populaire à l’extrême-droite partout en Europe.

Nous devons donc aujourd’hui voter pour un candidat ni de gauche, ni de droite qui aura profité du vide laissé par le délitement des grands partis traditionnels. La fracture politique s’est aggravée depuis 15 ans, les Français n’ont plus confiance dans le personnel politique. 

 

Dès le lundi 8 mai la gauche devra se remobiliser pour s’assurer une présence significative à l’Assemblée nationale lors des législatives des 11 et 18 juin prochains.Pour cela, de nombreuses questions devront être posées et des ambiguïtés devront être levées sur le programme du candidat d’En  Marche ! et de ses soutiens, qu’ils proviennent de la droite ou du parti socialiste : 

 

Comment garantir le fonctionnement des services publics quand on prévoit la suppression de 50.000 postes de fonctionnaires dans les services de l’État et de 70.000 dans les collectivités territoriales ? Faut-il réellement poursuivre les politiques d’austérité imposées par l’Europe en économisant 60 milliards d’euros aux dépends des Français ? Comment le candidat compte-t-il flexibiliser le marché du travail sans remettre en cause la protection des salariés ? Comment parviendra-t-il à transformer l’Europe et son dogme libéral sans modifier les traités ?

 

Il est évident que je ne pourrais soutenir des candidats issus du parti socialiste qui participeraient à une majorité qui prône la fin du droit du travail, dérégule, affaiblit les services publics et défend une Europe libérale et austéritaire.

 

Jean-Pierre Blazy

Député et maire socialiste de Gonesse

Jean-Pierre Blazy, député & maire socialiste de Gonesse

Jean-Pierre Blazy, député & maire socialiste de Gonesse

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31 janvier 2017 2 31 /01 /janvier /2017 09:47

Chronique "figure libre" dans L'Opinion publiée le lundi 30 janvier 2017 à 16h21

csuumfpwiaehdhaInstruits que nous sommes de la « complexité du monde », nous nous perdons parfois dans des explications alambiquées là où il faudrait faire simple.

Je suis le premier à traquer structures, fractures et références que révèlent un fait politique. Au point, trop souvent, d’obscurcir une réalité d’une limpide clarté. Ainsi, si Benoît Hamon a gagné, c’est avant tout parce qu’il a fait une excellente campagne, mûrie de longue date, qu’il a su imposer des thèmes qui correspondaient à l’horizon d’attente de celles et ceux qui se déplacent pour une primaire de gauche. Il a su, aussi, bénéficier de trois incontestables points d’appui.

Premier point qu’on finirait presque par oublier : les électeurs de gauche (car les sympathisants socialistes ne sont pas les seuls à s’être déplacés) ont d’abord et avant tout voté pour sanctionner le bilan du quinquennat. Certes, la plupart des candidats avaient participé au gouvernement. Mais soit qu’ils aient occupé un poste mineur, soit qu’ils aient quitté le pouvoir plus tôt, ils sont parvenus à le faire un peu oublier. Ce n’est pas le cas de Manuel Valls, perçu, en dépit de ses efforts, comme le candidat de remplacement du Président sortant, et pour qui le bilan contesté aura été comme le sparadrap du capitaine Haddock. Ajoutons de surcroît que l’ancien Premier ministre avait, en son temps (et il doit sûrement s’en mordre les doigts aujourd’hui), appelé à une clarification entre deux gauches qualifiées par lui d’irréconciliables. Or l’électorat de gauche, même en proie au doute, reste profondément unitaire.

Attrait pour la nouveauté. La deuxième raison évidente, c’est l’attrait pour la nouveauté, qui est la conséquence de ce que j’appellerais la démocratie de la déception. Depuis des mois, chacun allait répétant que les Français ne voulaient pas d’une réédition de la présidentielle de 2012 : les primaires (de droite comme de gauche) en ont offert une éclatante illustration. Tentés de tourner la page à peine ouverte, les votants ont tendance (normale chez les Français) à couper les têtes à partir du moment où elles sont connues. Élimination de Sarkozy, empêchement d’Hollande, défaites de Duflot et de Juppé : on peut sourire de ce plaisir un brin sadique à dégommer les favoris, à ne pas s’en laisser compter, que les amis de Jean-Luc Mélenchon appellent, en référence à des mouvements sud-américains, le « dégagisme ». Mais il en dit long sur la crise de l’efficacité politique, sur la colère qui naît de la distorsion entre les promesses et les actes.

La troisième raison, c’est évidemment l’erreur des concurrents de Hamon, qui n’est pas seulement de l’avoir sous-estimé, mais surtout de l’avoir caricaturé en « candidat de l’utopie ». D’abord parce que les électeurs, et singulièrement ceux de gauche, ne voient pas négativement les candidats qui prétendent imaginer le monde de demain. Il y a, dans une certaine frange de la population, un regain d’intérêt pour les « utopies concrètes », comme en témoigne le succès d’un film documentaire comme Demain.

Il y a dans le succès d’Hamon comme une social-démocratisation de Nuit debout, qui en embrasse à la fois les thèmes et la méthode

Écologie, partage, frugalité : cette version post-marxiste de la critique du système ne fait pas seulement un carton dans la petite bourgeoisie citadine, elle inspire bien des citoyens inquiets de la dynamique effarante du capitalisme d’aujourd’hui. Et, comme c’est souvent le cas à gauche, les victoires politiques prolongent des mouvements sociaux qui se sont souvent soldés par des défaites. Il y a dans le succès d’Hamon comme une social-démocratisation de Nuit debout, qui en embrasse à la fois les thèmes et la méthode.

Proximité bonhomme. Très habilement, le candidat, réfutant l’argument de la « présidentialité » verticale, a au contraire joué de sa proximité bonhomme, un « boy next door » sincère et accessible. De toute façon, Sarkozy et Hollande ont, malgré eux, contribué à dé-jupitériser la fonction. La droite l’accepte moins, mais la gauche s’y résout, voire le désire, tant elle est génétiquement hostile au pouvoir personnel. Et les attaques en « manque de crédibilité » ratent d’autant mieux leur cible quand elles sont proférées par ceux qui ne furent guère efficaces au pouvoir.

Déjà les commentateurs frétillent : et si c’était, enfin, la fin du PS ? Les prémisses du grand schisme ? Et chacun d’évoquer les grands repères de l’histoire récente, à commencer par 1969, date à laquelle Gaston Defferre réalise à peine 5 % à la présidentielle, précipitant la disparition de la SFIO croupissante.

Ceux qui cherchent à réduire le débat d’aujourd’hui à un affrontement entre « gauche de gouvernement » et « gauche radicale » font erreur

Mais la vérité est que nous n’en savons rien. Dans ce paysage politique mouvant incertain, rien ne dit que la centralité du PS à gauche sera réellement remise en cause.

Ce que je sais en revanche, c’est que ceux qui cherchent à réduire le débat d’aujourd’hui à un affrontement entre « gauche de gouvernement » et « gauche radicale » font erreur. Rappelons d’ailleurs qu’à l’exception de l’extrême gauche trotskiste, tous les partis dits « progressistes » engagés dans la campagne ont participé à l’exercice du pouvoir d’Etat, ou à défaut à celui du pouvoir local, avec ce que cela implique de prise en compte des contraintes et d’élaboration de compromis.

En réalité, la gauche tâtonne pour répondre aux trois crises auxquelles tous les partis d’Europe héritiers du mouvement ouvrier sont confrontés. Crise idéologique d’abord, liée à la sidération devant la puissance (et la violence) du capitalisme financier transnational et les conséquences (écologiques, sociales, culturelles) de cette « mondialisation libérale » dans la vie des hommes et des sociétés.

Electorat friable. Crise sociologique ensuite, qui touche davantage la gauche que la droite (laquelle peut s’appuyer sur un socle électoral moins friable), et qui révèle a la fois des fractures de classe et des fractures territoriales. Crise stratégique enfin, qui voit s’affronter les tenants du recentrage libéral, les promoteurs de la synthèse à gauche, les partisans de la social-écologie.

La campagne présidentielle ne réglera évidemment pas ces problèmes structurels. Mais le cap que choisira Benoît Hamon permettra peut-être d’esquisser un début de réponse.

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12 décembre 2016 1 12 /12 /décembre /2016 11:00

En annonçant qu’il ne briguerait pas un second mandat, François Hollande a fait un constat lucide : il n’est pas en situation d’assurer le rassemblement des forces de gauche et écologistes. Ce qui lui est impossible l'est donc tout autant pour son premier ministre Manuel Valls, concepteur de la thèse des deux « gauches irréconciliables ».

Nous l'affirmons, aucune victoire, aucun rassemblement à gauche ne sont envisageables si le candidat – ou la candidate – soutenu par le PS en 2017, s’inscrit dans la ligne politique, économique et sociale qui prévaut depuis juin 2012, s'il ne cherche pas une fois désigné à rassembler toute la gauche.

Pour plusieurs d'entre nous – qui soutenions la candidature de Marie-Noëlle Lienemann ou qui attendions que les multiples candidats de gauche à la primaire s'accordent enfin – l'heure des choix est venue. Nous saluons donc l'initiative prise par la sénatrice socialiste de Paris d'appeler à l'unité des candidats alternatifs à la ligne Hollande-Valls-Macron et d'avoir annoncé en conséquence qu'elle renonçait à se présenter pour permettre cette unité.

Ce qui unit les propositions d'Arnaud Montebourg, de Marie-Noëlle Lienemann ou Benoît Hamon constitue un base sérieuse pour ce projet alternatif que la gauche doit présenter au pays. Il ne s’agit en rien de nier les différences d’approche mais il faut aujourd’hui aller à l’essentiel, privilégier l'élan du rassemblement et construire un mouvement de convergence. Un mouvement pour aller au-delà de là stricte affirmation de nos conceptions respectives.

Nous reconnaissons qu'un mouvement s'est opéré autour de la candidature d'Arnaud Montebourg, mais il ne serait pas possible de choisir une candidature plutôt qu'une autre à la seule lecture de sondages, dont on a vu à quel point ils étaient trompeurs, ou sur des sympathies personnelles.

Depuis longtemps, nous partageons avec lui un regard et des approches communes sur la nécessité de restaurer la souveraineté populaire, une démocratie vivante, face aux dérives présidentialistes de la Vème République et à la lente agonie du projet européen sous l'effet des politiques libérales et austéritaires. Ce combat nous rassemble.

Depuis son entrée en campagne, Arnaud Montebourg a pris en compte de nouvelles dimensions nécessaires dans le projet qu'il soumet aux électeurs de gauche : la relance par le pouvoir d'achat et la nécessité de coups de pouce au SMIC, le renforcement des protections sociales et des services publics, l'abrogation de la loi Travail, et une volonté d'engager profondément la transition écologique et numérique qui sont des enjeux majeurs pour les Français et notre pays.

Ce socle proposé par Arnaud Montebourg nous paraît aujourd'hui solide – et financé, puisqu'il s'agit d'assurer à nos concitoyens que la gauche ne prend pas d'engagements à la légère – pour engager le rassemblement. Et nous appelons l'ensemble des militants et sympathisants de gauche à franchir cette étape avec nous.

Comment parviendrions-nous à conjurer la menace d'une droite réactionnaire et de l'extrême droite si nous ne prenons pas aujourd'hui l'engagement de l'unité ? Si nous, qui sommes si proches, ne savons pas dépasser nos petites différences, comment pourrons-nous le faire avec d’autres ensuite et convaincre nos concitoyens que notre projet est majoritaire à gauche face au libéralisme ?

Le succès à la primaire de gauche est un préalable, une première étape. Il doit créer un électrochoc, être le point de départ d’une nouvelle donne, du dépassement des multiples candidatures des écologistes à la gauche radicale pour vaincre les droites mobilisées.

Frédéric FARAVEL, membre du bureau fédéral du PS95 et du conseil national du PS (Bezons) – Sébastien LOMBARD, secrétaire de la section PS Haut-Val-d'Oise, membre du conseil fédéral du PS95 (Persan) – Jérôme HAINE, membre du conseil fédéral du PS95 (Méry-sur-Oise) – Manon COMTE, secrétaire de la section PS Eaubonne-Montlignon, membre du bureau fédéral du PS95 (Eaubonne) – Sébastien FONTAGNEU, secrétaire de la section PS d'Enghien/Deuil-la-Barre (Enghien-les-Bains) – Marianne BAK, adjointe au Maire PS d'Écouen, membre du conseil fédéral du PS95 – Didier DAGUE, conseiller municipal de Courdimanche, conseiller communautaire délégué de l'agglomération de Cergy-Pontoise, membre de la commission fédérale des conflits du PS95 – Adélaïde PIAZZI, conseillère municipale et secrétaire de section PS de Montmorency, membre du bureau fédéral du PS95, membre de la commission nationale des conflits du PS – Ousmane DIAGANA, secrétaire de la section PS de Montmagny, membre du conseil fédéral du PS95 Élise PIETROBON, membre du conseil fédéral du PS95 (Montmagny) Denis FÉVRIER, membre du conseil fédéral du PS95 (Cergy)Calvin JOB, conseiller municipal PS de Beaumont-sur-Oise, membre du conseil fédéral du PS95

les candidats alternatifs à la politique Hollande-Valls-Macron à La Rochelle le dimanche 11 septembre 2016

les candidats alternatifs à la politique Hollande-Valls-Macron à La Rochelle le dimanche 11 septembre 2016

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23 novembre 2016 3 23 /11 /novembre /2016 11:27

emmanuel_maurel_margot_lhermiteLundi 21 novembre 2016 à 17h24 - Chronique "figure libre" dans L'Opinion

Plus encore que la primaire socialiste de 2011, celle de la droite est un succès. Quatre millions d’électeurs, c’est énorme. On disait que le principe même d’une présélection démocratique n’était pas franchement conforme à la tradition gaulliste : manifestement, le désir d’alternance a été plus fort que les réticences ataviques. On savait le « peuple de droite » capable de mobilisation dans l’adversité, comme il l’avait démontré entre les deux tours de la présidentielle de 2012. Il l’est tout autant dans la revanche et la volonté de conquête.

La primaire s’installe donc dans le paysage politique français. Les partis, victimes de la défiance grandissante de nos compatriotes, en ressortiront affaiblis, en tout cas condamnés à se réinterroger profondément.

Si, contrairement à 2011, les débats télévisés ont joué un rôle décisif, le vainqueur du premier tour peut aussi remercier ses deux principaux concurrents. Toute l’attention médiatique a été captée par le duel annoncé entre Nicolas Sarkozy et Alain Juppé, et les coups que l’un et l’autre se sont portés profitent finalement à celui qui devait, au mieux, rester cantonné au rôle de « troisième homme ». Nicolas Sarkozy a surjoué l’indignation face à une supposée « tentation centriste » et fustigé l’alternance molle. En face, le camp Juppé a surfé paresseusement sur l’antisarkozysme. Pendant que les deux finalistes pressentis se neutralisaient, le député de Paris continuait tranquillement son chemin.

La France des sous-préfs. Oui, Sarkozy s’est trompé de campagne. Assuré de son socle militant, il a tenté de rééditer sa campagne de 2007, qui visait à mobiliser la droite « populaire », celle des perdants de la mondialisation et des classes moyennes taraudées par l’angoisse du déclassement et, partant, sensibles aux questions identitaires. Juppé, persuadé que le vote des personnes âgées lui était acquis, a pensé qu’il fallait élargir son audience en se déringardisant, c’est-à-dire en envoyant des signaux aux jeunes, aux geeks, aux habitants des métropoles prétendument plus progressistes et plus ouverts : d’où cette idée d’« identité heureuse » qui, faute de théorisation suffisamment étayée, a jeté le trouble plus qu’elle n’a convaincu.

L’un lorgnait vers le FN, l’autre vers le centre et la gauche, Fillon a attaqué le cœur de cible de la droite française, en tout cas de celle qui vote aux primaires. Je lis sous la plume de celles et ceux qui voudraient la déprécier parce qu’elle n’est pas franchement mainstream ou glamour, qu’il a conquis la « bourgeoisie provinciale, conservatrice », donc nostalgique. La France tranquille des sous-préfectures en quelque sorte, qui (me) fait moins rêver que celle de Jean Ferrat. Ce n’est pas totalement faux. Mais elle existe et s’exprime, et Fillon a eu l’intelligence de s’en souvenir.

Il faut également ajouter un élément important. De même que la victoire de Jospin en 1997 était le contrecoup électoral des grandes grèves de 1995 contre le plan Juppé pour les retraites, le score de Fillon en 2016 concrétise politiquement une dynamique sociale, celle de la Manif pour tous. Ce mouvement puissant, dont quelques chercheurs avaient démontré le potentiel militant et électoral (on pense à Gaël Brustier), a été présenté comme une sorte d’ultime baroud d’honneur de ce qu’Emmanuel Todd a appelé le « catholicisme zombie ». Or il s’avère que les morts sont bien vivants. Et les naïfs de redécouvrir que la France, toute laïque qu’elle est, n’a pas été la fille aînée de l’Eglise pour rien.

La gauche devra se garder de privilégier une stratégie de type «Terra Nova», renvoyant des pans sentiers du pays dans le camp de «la France rance» congénitalement hostile au progrès.

Fillon a donc opéré, contre toute attente, une forme de synthèse à droite, comme un point d’équilibre, à la fois sur la forme et sur le fond : plus sobre que Sarkozy et plus déterminé que Juppé, moins identitaire que le premier et plus conservateur que le second. Celui-ci, s’il veut encore l’emporter, ou du moins limiter l’ampleur de la défaite, ne peut parier que sur la mobilisation du centre, et même d’une partie de la gauche, au risque de se « NKM-iser ». Difficile.

Mais, comme en 2011 pour la gauche, il y a fort à parier que le rassemblement s’opérera sans heurt autour du candidat. Pas seulement par goût de la victoire ou par envie d’avoir un chef. Ce qui m’a frappé dans les débats de la primaire, c’est une forme d’homogénéité idéologique. Certes, il existe de vraies divergences dans le domaine de la politique internationale. Si Fillon l’emporte, il sera le premier candidat de la droite à la présidentielle à avoir voté non à Maastricht. Guère inspiré par les questions européennes (le séguinisme d’antan est déjà loin), il prône en revanche une vraie rupture avec la politique diplomatique de la France pratiquée sous Hollande et son prédécesseur, en préconisant notamment un rapprochement franco-russe, ce qui ne manquera pas de susciter de vraies controverses.

Normalisation post-gaulliste. En matière économique et sociale en revanche, les différences sont moins grandes qu’on ne le dit. Il n’y a pas eu l’équivalent d’un Arnaud Montebourg introduisant le concept de « démondialisation » et en tirant des préconisations politiques assez nouvelles pour la gauche. Peu d’hétérodoxie ici : à l’exception du très marginal Jean-Frédéric Poisson, tous les autres candidats portent le même diagnostic et proposent, peu ou prou, les mêmes solutions. Pour réduire le chômage de masse, il faut moins de dépenses publiques, moins de « charges » pour les entreprises, moins de « rigidités sur le marché du travail », moins d’Etat. Haro sur les fonctionnaires et les 35 heures ! Sus à la CGT !

De ce programme radical mais convenu, riche en contradictions (créer de l’emploi en commençant par un plan de licenciement massif, fut-il dans la fonction publique) et à contretemps (choisir l’austérité au moment où l’Europe redécouvre les vertus de la relance), on retiendra que la normalisation post-gaulliste de la droite française est achevée. Juppé et Fillon pourront toujours s’affronter à coups de milliards et de pourcentages, se revendiquer l’un de Chirac, l’autre de Thatcher, il y a, dans les propositions économiques des deux finalistes, une différence de degré, pas de nature. Et, à la clé, un risque majeur d’explosion sociale en cas de victoire. Car qui pense sérieusement, même à droite, que notre pays subira fermeture des services publics et saignée sociale sans réagir ?

Je suis persuadé que les Français n’ont absolument pas envie d’une révolution conservatrice avec vingt ans de retard. Ce sera, à n’en pas douter, un des principaux arguments de la gauche pendant la campagne présidentielle. Mais elle devra se garder de privilégier une stratégie de type « Terra Nova », renvoyant des pans entiers du pays dans le camp de « la France rance » congénitalement hostile au progrès. De même, orpheline de l’antisarkozysme qui a longtemps été son ciment, elle ne saurait se borner à un désespérant « avec nous, c’est mieux que si c’était pire ». Notre démocratie mérite mieux.

Emmanuel Maurel, député européen socialiste - chronique "Figure Libre" dans L'Opinion

Emmanuel Maurel, député européen socialiste - chronique "Figure Libre" dans L'Opinion

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16 septembre 2016 5 16 /09 /septembre /2016 13:59
Intervention de Gérard Filoche

Gérard Filoche intervenait le dimanche 11 septembre 2016 vers 10h00 devant les militants et sympathisants de la motion B "à gauche pour gagner !" du Parti Socialiste, lors des Journées d'été de ce courant organisées à La Rochelle. 
Il introduit la première table ronde de la matinée intitulée "pour en finir avec le chômage de masse".


Intervention de Gérard Filoche aux Journées d... par agauchepourgagner

Intervention d'Arnaud Montebourg

Arnaud Montebourg, candidat à la présidence de la République dans le cadre des primaires de la gauche, intervenait le dimanche 11 septembre vers 11h pour conclure la plénière intitulée "En finir avec le chômage de masse" lors des Journées d'été de la Motion B "à gauche pour gagner !" à La Rochelle.


Intervention d'Arnaud Montebourg à La Rochelle... par agauchepourgagner

Intervention de Benoît Hamon

Benoît Hamon, député PS des Yvelines, intervenait le dimanche 11 septembre 2016 vers 11h10 du matin devant les militants et sympathisants de la motion B "à gauche pour gagner !" du Parti Socialiste. 
Il introduisait la table ronde "Pour une nouvelle offensive démocratique".


Intervention de Benoît Hamon aux Journées d'été... par agauchepourgagner

Intervention de Marie-Noëlle Lienemann

Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice socialiste de Paris et candidate aux primaires de la gauche pour l'élection présidentielle de 2017, intervenait, devant les militants réunis lors des Journées d'été organisées par la motion B "à gauche pour gagner !" du Parti Socialiste, pour conclure la table ronde "Pour une nouvelle offensive démocratique".


Intervention de Marie-Noëlle Lienemann aux... par agauchepourgagner

Intervention de Christian Paul

Christian Paul, député socialiste de la Nièvre et premier signataire de la motion B du PS, intervenait dimanche 11 septembre 2016, devant les militants et sympathisants de la motion "à gauche pour gagner !" pour conclure les Journées d'été organisées par ce courant du PS à La Rochelle.


Intervention de Christian Paul aux Journées d... par agauchepourgagner

Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche, Christian Paul et Arnaud Montebourg, après la conclusion des Journées d'été de la motion B du PS dimanche 11 septembre à La Rochelle

Benoît Hamon, Marie-Noëlle Lienemann, Gérard Filoche, Christian Paul et Arnaud Montebourg, après la conclusion des Journées d'été de la motion B du PS dimanche 11 septembre à La Rochelle

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15 septembre 2016 4 15 /09 /septembre /2016 14:17
La motion B du PS a lancé un nouvel appel le samedi 10 septembre 2016 à des primaires de toute la gauche

La motion B du PS a lancé un nouvel appel le samedi 10 septembre 2016 à des primaires de toute la gauche

La Rochelle, samedi 10 septembre 2016,

 

Seule une grande primaire de toute la gauche et des écologistes peut garantir l’espoir d’une alternative crédible et prémunir contre l’immense défaite annoncée.

Car tout l’indique désormais : si rien ne change, la gauche française sera effacée de l’élection présidentielle, absente du second tour. Nous devons briser cette fatalité. Personne ne peut ignorer que derrière notre effacement durable, viendraient la revanche de la droite ou la conquête du pouvoir par le Front National.

Sourd à nos alertes, l’exécutif persévère dans son erreur. Il est le principal responsable de la dislocation de la gauche et de l’affaiblissement sans précédent du Parti socialiste.

Ce quinquennat tant espéré a suscité une déception d’une ampleur inédite. La France, pays meurtri, a besoin d’un projet optimiste.

Partout existent des énergies, des idées, des volontés de progrès et de transformation. C’est l’idée même de rassemblement qu’il faut désormais faire vivre.

Nous, À Gauche Pour Gagner, adressons cet appel à tous, Françaises et Français, qui se reconnaissent dans nos valeurs, et à toutes les forces politiques de la gauche sans exception :

  • Nous appelons à une grande primaire citoyenne et ouverte, de toute la gauche et des écologistes, sans exclusive et sans préalable. Son organisation doit garantir une loyauté totale et une transparence que chacun pourra contrôler. Il est grand temps de la mettre au cœur du débat public.

  •  La primaire ouvre la perspective d’une alternance venue de la gauche. En France et Europe, les gauches sont confrontées à des choix historiques. Nous pouvons convaincre. Nos idées sont des antidotes aux crises économiques, sociales ou écologiques qui frappent d’abord les plus faibles. Elles sont majoritaires dans la gauche française. Aux citoyens de le confirmer. Nous ne devons pas craindre la primaire. Avec À Gauche Pour Gagner, nous la préparons en allant, par étapes, vers une candidature unique.

  • Seul un grand événement démocratique, un débat franc et fécond, peut devenir attractif pour des millions de citoyens et redonner à la gauche l’espoir qui lui fait cruellement défaut.

L’esprit de responsabilité conduira au rassemblement, pas à une unité éphémère. La primaire le rend possible. A nous de rendre ce rassemblement désirable !

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28 juin 2016 2 28 /06 /juin /2016 15:33
"Une alternative est née" - déclaration de la motion B du PS, à gauche pour gagner

L’élection présidentielle de 2017 est un moment de très haut risque pour la France. Nous n’avons cessé depuis deux ans de dénoncer ce danger et les choix qui conduisent le Parti socialiste à l’échec, du Pacte de responsabilité à la loi Travail, de la déchéance de nationalité à l’interdiction de manifester… Au Parlement, nous avons alerté, proposé des orientations positives et progressistes, résisté à des décisions à contre-emploi pour la France et à contre-sens pour la gauche. En France comme dans l’Union européenne, entrée désormais en turbulences, les politiques conformistes et le manque d’ambition ont convaincu beaucoup de citoyens que l’action publique ne pouvait rien pour eux, ou si peu.
Aujourd’hui, nous en tirons les conséquences politiques en nous adressant aux Français. Nous défendrons, à l’occasion de la primaire, la candidature d'une autre gauche de gouvernement.

1) Nous engageons la préparation d’une “plate-forme 2017”. Elle sera notre contribution à la primaire, puis à l’élection de 2017.

La politique, c’est d’abord la bataille des idées.
Il s’agit de briser la fatalité des crises, des défaillances démocratiques, et surtout de proposer un projet optimiste.
Conquérir les souverainetés, mieux maitriser les destins collectifs, pour la France comme pour l'Europe, c’est le contraire d’un repli souverainiste ou nationaliste. C’est lutter contre le déclin à Paris et la déconstruction à Bruxelles.
Sans autre vision que l’adaptation à la mondialisation néo-libérale sans en mesurer les dégâts irréparables, la gauche française s’égare et se perd.
Notre réformisme ambitieux s’assigne pour but la transformation de ces systèmes à bout de souffle, à chaque étage. Cette priorité démocratique est devenue le préalable nécessaire. Aucune oligarchie, de classe ou de parti, ne peut conduire les modernisations urgentes et faire émerger un modèle de développement acceptable. Sans le peuple, rien n’est possible.
Transition écologique, transformation numérique, réforme fiscale et bancaire, sécurité sociale professionnelle et politiques pour l’égalité, rien de ce qui fait un programme offensif à gauche n’est possible sans des formes démocratiques nouvelles, partout et avec tous
Libre de droits d’auteur, cette plate-forme sera disponible pour tous, à gauche et au-delà.
Nous l’écrirons à mille mains, à partir d’un texte initial, durant l’été, avec les socialistes, et tous ceux qui veulent participer à ce nouveau moment d’invention collective.

2)  Une candidature au cœur de la gauche doit émerger à l’occasion d’une primaire citoyenne, largement ouverte et mobilisatrice.

Contre la police des idées, nous affirmons le devoir d’inventaire et l’existence d’une alternative crédible. 
Parce que nous refusons de faire l’impasse sur 2017, les primaires que nous avons voulues et obtenues de haute lutte vont être un moment essentiel auquel pourront participer des millions de Français. C'est dans cet objectif que nous les investirons pleinement. Cet événement démocratique est la condition du rassemblement.
Nous en appelons à toute la gauche, sans exclusive et sans préalable. Il est encore temps, grand temps, de faire converger nos idées et nos projets pour la France.
Rassemblés, nous pourrons gagner cette primaire, et mener avec fierté une campagne vers le premier, puis le second tour de l’élection présidentielle.
Par étapes, nous réunirons les conditions pour qu’une candidature commune défende notre projet, dans l’esprit collectif qu’attendent les citoyens. Parce qu’il est urgent qu’une nouvelle dynamique soit offerte au pays. Parce que les socialistes sont disponibles pour soutenir une telle candidature, et le disent avec une exigence légitime. 
Nous poursuivrons les dialogues nourris dans l’action avec l’ensemble de la gauche politique et syndicale. La “grande coalition” des gauches et des écologistes doit servir de boussole à la réinvention à venir de la gauche française. Nous regrettons, sans polémique, les tentatives que mène la direction actuelle du PS pour redéfinir au fil de l’eau les alliances stratégiques et électorales, au risque de se replier et de tuer l’espoir.
Nous poursuivrons les échanges plus que jamais indispensables avec tous ceux qui, en Europe, mènent des combats éclairants, au moment où le PSE, semblable à l’Union, ne parvient pas à porter de nouvelles solidarités.

3)   Nos “journées d’été de Nantes” seront déterminantes pour atteindre ces objectifs.

Nous nous y retrouverons les 25 et 26 août prochains, dans les locaux de la “Manu”, l’ancienne manufacture des tabacs, avec les militants et nos invités.

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23 juin 2016 4 23 /06 /juin /2016 09:25

Emmanuel Maurel était l’invité du journal de France Culture le lundi 20 juin 2016, aux côtés de Michel Wieviorka

« Nous étions très nombreux à demander des primaires, il me paraît tout à fait naturel que tous les socialistes qui veulent être candidats à la présidentielle s’y soumettent. (…) Il n’aura échappé à personne que la candidature de François Hollande n’a rien d’automatique et naturelle. Au bout de 4 ans, il faut le reconnaître, même au sein du Parti socialiste, son action est contestée, son bilan pose question, et il est bien que ces choix soient remis en question. »

« Si primaire il y’a, débat citoyen il doit y avoir. Il serait absurde d’avoir une primaire dont on rogne le temps, qui soit faite à la va-vite. La question c’est les conditions d’organisation :

1- aura-t-on une dizaine de milliers de bureaux de vote ? ;
2- combien aura-t-on d’assesseurs ?
il faut se donner les moyens d’une primaire réussie ;
3- à l’évidence elle doit être ouverte au plus grand nombre possible ;
4- il faut qu’il y ait liberté de candidature, y compris au PS.

Cela va mieux en le disant. »

Emmanuel Maurel, député socialiste européen

Emmanuel Maurel, député socialiste européen

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31 mai 2016 2 31 /05 /mai /2016 15:52

La vraie question concernant l’initiative d’Emmanuel Macron n’est pas de savoir s’il roule pour François Hollande, pour lui-même ou encore s’il concurrence Manuel Valls sur son propre terrain. Ajouter de la confusion à la confusion ne présente guère d’intérêt au moment de la discussion au Parlement de la loi Travail. Le vrai sujet est au contraire de comprendre que le Président, le Premier ministre et le ministre de l’Économie poursuivent d’un commun accord la marche vers la transformation de notre modèle social, une marche arrière malheureusement plutôt qu’une marche avant, quoiqu’en dise François Hollande qui prétend préserver notre modèle social français.

La refondation dont le pays a besoin selon Emmanuel Macron « doit se faire sur des valeurs communes: la liberté et la justice, le travail, le progrès, l’Europe ». Et depuis Londres, il incite François Hollande à prendre « des décisions ambitieuses » et à faire « des réformes radicales, fortes et ambitieuses » pour être « dans une situation de gagner » en 2017. Sous-entendu faire les réformes qui dérégulent et favorisent le dumping social, qui accroissent la flexibilité au détriment de la sécurité. Emmanuel Macron veut aller jusqu’au bout de la logique de la transformation néolibérale du modèle économique et social français engagée depuis les premières réformes de la législation du travail à partir de 1977. Pour lui comme pour le MEDEF la loi travail ne va pas assez loin.

Et pourtant le texte même modifié dans le sens que ne souhaite pas le ministre de l’Économie, en dépit des mesures positives qu’il contient désormais en particulier en faveur des jeunes, s’avère être également une nouvelle opération de dérégulation du travail :

  • conditions moins favorables pour négocier la majoration des heures supplémentaires dans le cadre de l’entreprise par rapport à celles de la convention de branche,
  • conditions facilitant l’organisation du référendum d’entreprise.

En effet, depuis près de quarante ans les réformes successives de la législation du travail ont facilité le développement des contrats précaires et de la flexibilité interne des entreprises. Elles n’ont pas pour autant permis de créer les emplois pour faire reculer le chômage de masse apparu dans le même temps. Mais elles ont provoqué l’accroissement des inégalités sociales. C’est ce que comprennent désormais une majorité de nos concitoyens qui s’opposent à cette énième réforme du même type tout comme une partie de notre jeunesse qui manifeste contre le projet de loi travail.

L’ubérisation de l’économie que veut accélérer Emmanuel Macron peut faire malgré tout illusion en faisant croire à la création d’emploi possible et facile de l’entreprise individuelle qui crée son emploi. À la fin des  années 70, Raymond Barre proposait déjà aux chômeurs de créer leur entreprise et leur emploi. La popularité provisoire d’Emmanuel Macron procède finalement d’une illusion déjà ancienne.

Mais face à un chômage qui ne s’inverse toujours pas et à la précarisation toujours plus grande de l’emploi qui dévalorise le travail, face à l’aggravation des inégalités sociales qui fracturent la cohésion sociale et nationale, la question centrale pour les socialistes et la gauche doit être à la fois de concevoir les conditions d’une nouvelle croissance durable favorisant la création d’emplois durables et de repenser les conditions de travail permettant de donner à nouveau du sens au travail. Si en 2016 la gauche ne me satisfait pas, ce n’est pas pour les mêmes raisons qu’Emmanuel Macron. Lui propose le vieux projet consistant à confondre droite et gauche pour mieux répondre aux besoins de la mondialisation et de l’Europe. Moi c’est parce que le quatre-vingtième anniversaire du Front Populaire de 1936 mérite mieux qu’une gauche qui tourne le dos à son histoire et à son idéal et qui est surtout impuissante à agir sur le réel. Je n’ai pas brigué vos suffrages en 2012 pour faire cela.

Jean-Pierre Blazy
député socialiste, maire de Gonesse

1936-2016: EN MARCHE… AVANT OU ARRIÈRE ?
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18 mai 2016 3 18 /05 /mai /2016 14:06

LE MONDE | 18.05.2016 à 13h18

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Les Frondeurs : de gauche à droite, Daniel Goldberg, Aurélie Filippetti, Laurent Baumel, Christian Paul, Fanélie Carey Conte et Marie-Noëlle Lienemann à Paris, le 11 mai 2015. JOEL SAGET / AFP

Par Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques (Lille-II, CERAPS-CNRS)

Une nouvelle étape a été franchie dans les dissensions qui minent le Parti socialiste. Les députés frondeurs ont cherché, sans résultat, à présenter une motion de censure contre le gouvernement, celui soutenu par leur propre parti. Si le pouvoir a toujours mis à l’épreuve la cohésion socialiste, c’est une première dans l’histoire du PS, qui n’a jamais été confronté à de telles fractures dans sa majorité parlementaire.

Et le conflit n’est pas purgé, puisque la question de la «loi travail» reviendra en seconde lecture, sans doute avant juillet. Le recours au 49.3 a eu une vertu qui a été peu commentée : il a permis à de nombreux députés socialistes de s’abstenir de se prononcer sur la loi. Son désaveu va à l’évidence bien au-delà des frondeurs. Les députés de la gauche «récalcitrante» ont donc quelques semaines pour fourbir leurs armes et franchir la barre des 58 députés, si telle est leur volonté. Comment en est-on arrivé là ?

Trois légitimités, au fond, s’affrontent : celle de l’élection, celle du parti et celle de l’exécutif. La légitimité partisane est aujourd’hui démonétisée. Le parti est aux abonnés absents. Le rôle de ses dirigeants, Jean-Christophe Cambadélis au premier chef, est d’organiser d’improbables rapprochements («l’Alliance populaire»), de mater la rébellion (les menaces sur les investitures aux législatives), de sécuriser la candidature de François Hollande et d’adopter une position attentiste sur les primaires pour mieux en compromettre le déclenchement (elles sont pourtant obligatoires statutairement, même pour un président sortant). De fait, si les primaires ne sont pas rapidement décidées, elles seront impossibles à organiser sur le plan logistique.
Les résultats du congrès de Poitiers ont été complètement ignorés, alors que celui-ci était censé définir la ligne politique du parti. Dans la motion majoritaire, dont Jean-Christophe Cambadélis était le premier signataire, une position par anticipation sur la loi El Khomri avait été prise. On y lit : «Il faut rétablir la hiérarchie des normes : la loi est plus forte que l’accord collectif et lui-même s’impose au contrat de travail

Mépris et ligne sociale-libérale

S’appuyant sur le socle de légitimité du congrès, un rapport demandant une réorientation de la politique gouvernementale a été adopté par le bureau national à une très large majorité en juillet 2015 (29 voix pour, 1 contre, 3 abstentions). Il a été méprisé par le premier ministre, qui n’a cessé, depuis, de radicaliser sa ligne sociale-libérale, au mépris de la souveraineté militante.

La loi travail, qui ne faisait pas partie des engagements de 2012, n’a jamais été discutée au PS. Manuel Valls s’accommode de fait très bien de l’hémorragie militante du PS et de la décomposition de ses réseaux d’élus, après les débâcles répétées à toutes les élections intermédiaires depuis 2012.

Le PS, exsangue, ne peut plus guère opposer de résistance à la marche forcée libérale que le premier ministre lui impose. Sa dévitalisation sera utile pour la restructuration du paysage politique que Manuel Valls compte engager après 2017. Les frondeurs et le premier ministre ont un point commun : ils enjambent la débâcle présidentielle à venir et se projettent dans la recomposition qui va la suivre.

Syndrome classique du parti «godillot» lorsque le PS est au pouvoir ? La réalité historique est plus complexe : dans les expériences gouvernementales précédentes sous la Ve République (1981-1986, 1988-1993, 1997-2002), on oublie souvent de rappeler que le parti et le groupe parlementaire étaient associés à la définition de la politique gouvernementale – à travers des réunions hebdomadaires notamment.

Hyperprésidentialisation

Entre 1997 et 2002, la proximité entre Lionel Jospin, premier ministre, et François Hollande, premier secrétaire du PS, a beaucoup contribué à pacifier les relations au PS. Les rapports de force sont aujourd’hui beaucoup plus favorables à l’exécutif, devenu omnipotent. François Hollande n’a en aucune manière enrayé l’hyperprésidentialisation à l’œuvre depuis 2002. Les primaires n’y sont pas pour rien. Le président de la République aurait-il des comptes à rendre à un parti dont il n’a pas tiré son investiture de candidat ?

Comme le parti ne joue plus son rôle de régulation des différends et de production d’un point de vue commun, les débats se sont déplacés dans l’arène parlementaire. Les protagonistes en présence – le gouvernement et les frondeurs – s’y confrontent en jouant avec les ressources institutionnelles dont ils disposent (le 49.3 pour les premiers, l’arme de la motion de censure pour les seconds).

Les frondeurs transgressent la règle de la discipline du groupe parlementaire. En effet, la position majoritaire est censée statutairement s’imposer à tous. Selon une vieille tradition socialiste, les mandats appartiennent au parti, et non au député individuellement. Mais que devient ce principe de subordination quand le gouvernement piétine la légitimité de la délibération parlementaire et déroge aussi fortement à la légitimité électorale qui l’a porté au pouvoir ?

Cette légitimité conférée par le cycle électoral de 2012 est aujourd’hui largement bafouée. Il n’y a certes pas de mandat impératif en démocratie représentative. Mais les députés socialistes peuvent-ils se sentir engagés par une politique libérale qui tourne autant le dos aux programmes présidentiels et législatifs de 2012 ? Ils peuvent se prévaloir de la fidélité aux engagements de l’époque.

Viol de légitimité

Si le 49.3 est jugé comme une infamie par une partie de l’opinion de gauche et un déni de démocratie, c’est que son recours et sa verticalité objectivent avec brutalité la violence symbolique que le gouvernement exerce sur ses propres électeurs. Il s’agit bien d’un viol de légitimité. Les slogans de plus en plus violents des manifestants dans la rue ou les destructions de permanences parlementaires socialistes traduisent une exaspération inédite. La haine du PS fait florès.

Les frondeurs peuvent, non sans quelque argument, opposer la légitimité de l’élection à celle des statuts, que la direction n’invoque que lorsqu’ils sont à son avantage. Ils utilisent les armes qu’ils leur restent, au risque d’être réduits médiatiquement à leur pouvoir d’obstruction et de nuisance.

L’exécutif fait valoir quant à lui une légitimité supérieure, celle de la pratique du pouvoir et du réalisme gouvernemental. Cette course au «réel», qui imposerait compromis et accommodements, est sans fin au PS. Ses dirigeants les plus «modernes», toujours enclins à dénoncer un «surmoi marxiste», qui a pourtant largement disparu, exige toujours un aggiornamento idéologique de plus. Le réformisme est pourtant une perspective largement partagée par les socialistes dans leur ensemble, les frondeurs compris. Le Bad Godesberg est consommé depuis longtemps, mais c’est une nouvelle «clarification» que Manuel Valls appelle de ses vœux, comme si la loi d’airain de l’abdication devait encore s’imposer.

Pour sortir de l’impasse, Jean-Christophe Cambadélis a déféré les 26 députés renégats devant la haute autorité du PS. Ce recours de plus en plus courant à un tiers «neutre», que l’on observe aussi chez Les Républicains (LR), témoigne d’une juridicisation des partis, de plus en plus incapables de domestiquer leurs luttes internes. La haute autorité statuera-t-elle aussi sur la légitimité du dernier congrès ou l’organisation d’une primaire ? Les questions que doivent régler les socialistes ne sont pas solubles dans un arbitrage de droit. Elles sont bien politiques, et il est temps qu’elles soient tranchées.

Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques (Lille-II, CERAPS-CNRS)

Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques (Lille-II, CERAPS-CNRS)

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